Ça fait un sacré bail que je n'ai pas posté dans les sujets de réflexion, mais là, pour le coup, je ne pouvais décemment pas passer outre.
Manîthil (joli pseudo), je vais commencer par tracer parallèle à ton propos, puisque la finalité de mon argumentation et de la tienne se confond, mais en appuyant toutefois sur UN mot, qui est à mon sens la grande clef du problème...
Devenir.
Pas Être.
Et cela fait une énorme différence.
L'idée de Devenir n'implique pas forcément une finalité effective, elle implique le chemin vers celle-ci, le fait de tendre en son sens et d'aller vers elle, mais pas de réussir à l'atteindre. Car de fait, on peut s'efforcer de Devenir sans pour autant parvenir jamais à Être.
Idée de Progression, de cheminement, de continuité et d'Avancée. Pas nécessairement de fin effective. Fin visée certes, mais dont l'atteinte n'est pas le plus important.
Aussi, lorsqu'il est question de savoir si l'on peut toujours Devenir ce que l'on a envie d'Être ; je réponds Oui!
On peut toujours s'engager sur le chemin, décider de s'auto-imprimer une dynamique et une force pour
tendre vers. Toujours.
Du plus profond des tourments, on peut toujours s'employer à rechercher la lumière. Le moins réfléchi des êtres peut toujours, à n'importe quel moment, décider de Devenir meilleur. Rien ne dit que l'on trouvera la lumière, ou que l'être en question réussira à obtenir un résultat significatif ; mais l'Elan est là, et c'est ce qui compte.
Je maintiens donc ; on peut toujours, toujours, décider de Devenir. Où que l'on soit et qui que l'on soit. Ce qu'on ne peut pas toujours (et j'aurais même tendance à penser qu'on ne le peut jamais), c'est décider d'Être... et c'est tant mieux!
Tant mieux, parce qu'accéder directement, sans avoir eu à passer par une progression d'état premier à état second, à ce que l'on désire Être... ce serait perdre l'essentiel de ce qui fait le travail sur soi, le développement personnel et l'épanouissement des affinités.
Travail, Développement, Épanouissement... dans ces trois mots réside l'idée de continuité, de mouvement. Pas celle de fixité et de don intrinsèque et inextricable.
Suis-je en train de dire que de fait "Si on veut on peut?"... pas le moins du monde. Car, je n'en pense rien.
Cela signifierait donc qu'un paraplégique ne désire pas de toutes ses forces re-marcher?
Les muets ne pas parler à leurs proches?
Les enfants en effective déficience mentale ne pas avoir la même capacité de réflexion que leurs congénères?
L'exemple est facile, et on pourrait en aligner à foison, rien que pour finir de prouver que non, vouloir ne suffit pas pour pouvoir...
Vouloir suffit en revanche pour pouvoir Tendre vers.
Si l'on veut, on peut essayer. Si l'on veut, on peut commencer.
Le paraplégique peut employer toutes ses forces à se constituer cobaye pour la recherche travaillant sur la réfection de moelle épinière, le muet sur celle des cordes vocales, zones cérébrales... etc. L'enfant quant à lui, peut s'employer à sublimer son handicap, et à le dépasser, que ce soit par des procédés scientifiques ou non.
Il y a peu de chances que les uns comme les autres voient l'aboutissement de leurs efforts de leur vivant... mais ils se seront employés néanmoins à Devenir ce qu'ils avaient envie d'Être.
Quel intérêt si au final cela ne sert à rien?
Cela ne sert pas à rien. loin s'en faut.
Car si pour ceux qui ont initié le mouvement, l'aboutissement, bien que potentiellement en vue, n'est jamais venu assez près pour qu'ils le touchent de leurs phalanges ; ceux qui leurs succéderont, eux, profiteront du chemin déjà parcouru par ces premiers initiateurs, et mèneront peut être la dynamique à son terme.
De l'importance de passer le flambeau. De Transmettre.
Parce qu'en effet on ne peut pas toujours aboutir, que parfois -et même souvent - nous n'avons pas la possibilité de finir ce que l'on a commencé. Mais l'important justement, ce n'est pas de finir, c'est de commencer et de continuer. Commencer à construire, même si l'on n'en voit pas la fin, même si l'on ne pourra jamais, nous, contempler de nos propres yeux le fruit mûr de nos efforts ; d'autres, grâce à nous, le pourront.
D'autres continueront, et finiront notre construction. Ce qu'ils n'auraient pas pu faire si à un moment, quelqu'un ne s'était pas employé à débuter sans s'attacher à autre chose qu'à Devenir et à engager un Mouvement.
Alors, à travers eux, on contemplera peut être l'aboutissement du travail de plusieurs entités tendues vers l'avant.
En résumé ;
On peut toujours Devenir, oui, ce que l'on veut Être. Pas forcément l'Être, mais au moins s'efforcer de le Devenir.
Si l'on veut, on peut Tendre vers.
Un de mes Mantras parle en ces termes : "Là où il y a une Volonté, il y a un Chemin." (Je ne sais malheureusement plus de qui est cette phrase à l'origine, peut-être Goethe.)
Une ou deux bricoles encore ; Julia, il est bien loin d'être impossible de Vivre dans le monde actuel sans métier ni loyer
... enfin c'est un autre débat, un de mes préférés, sur lequel je m'épuise, mais un autre.
Cependant, sur le reste, je plussoie en très très grande partie tout ce que tu as écrit.